Auteur :
Allaoui
Mohamed
Année de Publication :
2022
Type : Article
Thème : Société
Couverture : Maroc
On avance dans cet article l'idée, très partagée, du changement social comme un processus continu, comme un résultat de transformations matérielles et immatérielles au sein d'un groupe social. On a, en même temps, noté des résistances, des accélérations, des inerties. Mais on n'a pas su dire quand la société avait changé, pas plus que nous n'avons pu dire s'il existait un moment de basculement d'un état social à un autre. Le regard sur la longue durée nous montre des successions de transformations, des avancées, des reculs. Il ne nous montre pas si, et comment, leur accumulation a, à des périodes identifiables, été perçue comme le marqueur d'un avant et d'un après. L'analyse extérieure pourrait, certes, concevoir une périodisation du changement, projetant telle ou telle batterie de critères pour montrer que l'on est passé d'une société à une autre. Mais un tel exercice serait largement arbitraire, tel autre analyste pouvant, avec des critères différents, parvenir à une autre périodisation du changement social. Cet exercice n'est vraiment probant que lorsqu'il existe d'indéniables ruptures, par exemple avant ou après la guerre, avant ou après la révolution, avant et après l'indépendance. La perception du changement social ne peut être que celle du vécu des acteurs des sociétés concernées. On se demande s'ils ont ressenti que l'on passait, peut-être même à plusieurs reprises au cours d'une vie, d'un état à un autre, que quelque part il y avait un avant et un après. Mais est ce qu'on n'entre pas dans une immense relativité ainsi. Les hommes, les femmes, les classes d'âge, les habitants de telle ou telle région et, à la limite, chaque individu ont leur propre perception du changement social. Si la temporalité du changement social a des réalités bien marquées, ce n'est qu'à l'échelle de la perception du vécu qu'elle peut être identifiée. Elle est, de ce fait, aussi diverse que le sont les groupes sociaux, les régions et les individus. Ces questions sont traitées en projetant l'interrogation sur la société rurale marocaine.