Abhatoo - Centre Nationale de Documentation

La dégradation des ressources naturelles atteint, de nos jours, un stade inquiétant à l’échelle des différentes régions marocaines. L’ampleur de l’exploitation que ces ressources ont subie au cours du siècle écoulé, conjuguée aux sécheresses récurrentes, a accentué le processus de dégradation dont les conséquences sont néfastes sur la déstructuration des territorialités des populations rurales et la déperdition des savoir-faire locaux.
Dans le Sud-Ouest marocain, l’Arganeraie qui s’étend sur une superficie de plus de 800.000 ha, présente l’un des meilleurs exemples de l’exploitation non durable des ressources naturelles. Or, de par ses valeurs écologique et socio-économique indéniables, cette forêt a constitué à travers l’histoire une ressource vitale pour les populations riveraines. Ces dernières ont su tirer profit de cette ressource en développant des pratiques ingénieuses afin d’en assurer une exploitation optimale et durable. Elles ont mis en place un système de production basé sur le triptyque « orge- arganier- chèvre », dont l’arganier est le pivot.
Certes, ce système n’arrive plus à répondre aux besoins croissants des populations en quantité et en qualité, favorisés par la grandeur des mutations socio-spatiales, mais il représente, en substance, une source d’inspiration pour l’adoption des approches innovantes de promotion de la ressource en question. En d’autres termes, l’ancrage de l’arganier dans la culture locale représente un atout à même de réhabiliter ledit système et d’infléchir la tendance de sa dégradation.
Dans ce sens, les initiatives de sauvegarde et de promotion de l’Arganeraie enclenchées depuis les années 1990, notamment dans le cadre de la coopération internationale accordent un grand intérêt aux savoir-faire locaux dans la valorisation de cette ressource. La richesse de la culture locale a facilité l’inscription de l’Arganeraie dans un processus de développement durable en commençant par sa reconnaissance par l’UNESCO comme patrimoine universel, en 1998, et en labélisant son produit phare « l’huile d’aragne », reconnue comme produit « IGP » : Indication Géographique Protégée. Ajoutons à cela que l’organisation de la filière « huile d’argane » se renforce de plus en plus et donne lieu à l’émergence d’un Système Productif Local (SPL).
Partant de là, la présente contribution ambitionne de mettre en relief le rôle des savoir-faire et de la culture locaux dans la promotion du développement durable d’une ressource (disons aussi un territoire) ayant subi une dégradation alarmante, et ce à travers deux démarches innovantes : la démarche SPL qui s’appuie sur les solidarités locales pour mieux organiser le processus de production et la démarche IGP qui repose sur le principe de la valorisation de la culture et des savoir-faire locaux.
Pour mieux comprendre l’enjeu que représentent ces approches pour la promotion du développement durable, nous nous attelons dans un premier temps à mettre en exergue les particularités de l’Arganeraie en tant que système écologique et socioéconomique, et à présenter quelques indicateurs par rapport à l’ampleur de la dégradation que l’arganeraie subit. Ensuite, nous abordons le contenu des démarches SPL et IGP et leur apport dans la valorisation des savoir-faire locaux, prélude au développement durable.