Abhatoo - Centre Nationale de Documentation

Le présent travail apporte une meilleure compréhension du fonctionnement hydroclimatique récent des bassins lacustres du Moyen Atlas marocain. Les lacs Ifrah, Iffer et Afourgagh ont été retenus pour cette recherche dans le but de caractériser l’impact climatique et anthropique sur leur fonctionnement. La méthodologie entreprise au cours de cette recherche est basée sur l’analyse physico-chimique saisonnière des eaux et de l’analyse sédimentologique, géochimique et minéralogique des sédiments d’interface. Le taux d’accumulation des sédiments et la chronologie des événements ont été déterminés par l’analyse radio-isotopique du ²¹⁰Pb.
L’impact climatique et anthropique sur le fonctionnement hydrogéochimique des trois lacs est représenté par la diminution importante du niveau lacustre et la dégradation de la qualité des eaux au cours des trois dernières décennies. Ce déficit hydrique s’est manifesté essentiellement par l’augmentation de la salinité des eaux et la sursaturation en alcalino-terreux responsables de la précipitation des carbonates. L’état trophique des lacs est en relation avec l’enrichissement en éléments nutritifs, l’augmentation de la charge particulaire et la dégradation de l’oxygénation des eaux. La forte évaporation et la consommation anthropique des eaux ont entraîné un assèchement temporaire des lacs Ifrah et Afourgagh particulièrement entre 2005 et 2006 et en été 2008.
Généralement épisodique, le mode de la sédimentation actuelle est considérablement influencé par la variabilité climatique et les perturbations anthropiques. Ceci est représenté principalement par la prédominance de la fraction organo-carbonatée sous l’effet de l’avancement de l’état trophique des lacs et l’augmentation de la précipitation des carbonates endogéniques. Un tel processus est lié à la succession des sécheresses et à l’élévation relative de la température moyenne au cours du dernier siècle. L’augmentation périodique des éléments détritiques alumino-silicatés et ferromagnésiens enregistrés au niveau des carottes des trois lacs paraît synchrone avec la forte hydrolyse des sols (déjà fragilisés par l’activité anthropique) au cours des années pluvieuses. La diminution du taux d’accumulation pendant les trois dernières décennies est due à la réduction de l’écoulement de surface et à l’assèchement de quelques affluents. La sédimentation actuelle dépend essentiellement de l’action éolienne qui redistribue les matériaux au niveau des sols et des terrasses exondées surtout au niveau des bassins versants des lacs Ifrah et Afourgagh.
Le dysfonctionnement actuel que connaissent les trois lacs suscite une attention particulière pour atténuer l’impact climatique et anthropique sur leur équilibre. En faisant intervenir tous les secteurs concernés, un plan d’aménagement d’urgence doit être mis en œuvre pour le suivi, la gestion et la préservation de ces milieux lacustres. Un tel aménagement doit être accompagné par une amélioration des conditions socio-économiques de la population locale très attachée à son environnement.