Abhatoo - Centre Nationale de Documentation

L'analyse des types d'organisation socio-économique, qui coexistent sur le plateau de Meknès-Fès permet de distinguer selon les évolutions historiques différentes qu'elles ont connues : Des collectivités fortement intégrées, ayant une base foncière collective, malgré son partage quasi définitif entre les ayants-droit ; des collectivités humaines dont les structures traditionnelles ont été bouleversées et ont éclaté ; et d'autres dont la cohésion est due à l'existence de terrains de parcours collectifs de plus en plus mis en culture. Les objectifs et formes assignés à l'intervention de l'Etat, ainsi que l'amélioration des conditions d'exploitation des terres sur lesquelles vivent ces groupements humains passent par : Une intervention sur les statuts juridiques des terres collectives où le démembrement du droit de propriété et d'usufruit constitue un obstacle majeur à leur mise en valeur ; une action au niveau de la répartition des terres en vue de promouvoir des exploitations de dimensions viables et de résorber les petites exploitations insuffisantes pour atteindre un niveau de productivité satisfaisant ; une action enfin au niveau du mode d'exploitation de l'ensemble de ces terres, par leur organisation selon une formule garantissant leur mise en valeur, en rapport avec leurs potentialités, sur la base des indications du plan d'aménagement agronomique proposé par le Projet Sebou. Dans une telle restructuration du monde rural, l’Etat est en mesure d’intervenir sur plusieurs plans, en fonction des types de statut juridique et des modes d’organisation sociale dégagés par l’analyse socio-économique. La remise en cause de la grande propriété marocaine étant hors de question, dans les conditions actuelles, seuls une action de l’Etat sur le plan juridique par la promulgation d'une charte de mise en valeur, pourrait aboutir à la disparition des systèmes d’exploitation du type des "azib" sur les grandes propriétés marocaines traditionnelles et à sauvegarder le niveau de production des terres de colonisation rachetées par des marocains. Cette charte devrait être conçue en fonction des plans d’aménagement agronomique du plateau et son exécution strictement contrôlée. Cependant, l'action de l’Etat sera amenée à se situer essentiellement sur un plan foncier en se concentrant sur le binôme : terres de colonisation - petites propriétés marocaines. L'existence entre les mains de l’Etat de terres dotées d'un haut niveau de productivité sur lesquelles s’exercent des revendications d'un secteur paysan caractérisé par l'exiguïté de ses exploitations, pose d'emblée le problème de l’avenir de l’agriculture sur le plateau de Meknès-Fès dans le cadre des rapports entre ce secteur moderne dominé par l'Etat et le secteur traditionnel dominé par des petits exploitants souvent non propriétaires. C'est-à-dire que les formules d'aménagement socio-économique que l'on pourrait envisager sur le plateau, dépendent étroitement de la décision concernant l'avenir des terres de colonisation récupérées ou en instance de l’être et dont la superficie couvre 108.000 ha environ. Ces formules doivent par ailleurs, s'inscrire dans une perspective purement économique excluant les objectifs sociaux à court terme et cherchant à élever au maximum le niveau de production de ces terres tout en faisant de celles-ci des pôles d’entraînement du secteur traditionnel dans la voie de la modernisation. Cette perspective est essentiellement perçue comme une liquidation du dualisme structurel qui caractérisa la vie économique et sociale sur le plateau de Meknès-Fès.