Abhatoo - Centre Nationale de Documentation

Les plages représentent le capital naturel de base sur lequel repose le tourisme balnéaire. Elles constituent également des réserves de sable et des remparts naturels contre les assauts de la mer, de plus en plus fréquents en lien avec le changement climatique. Malheureusement ces plages sont en perpétuel recul en raison de multiples pressions humaines qui s’y exercent, notamment l’extraction du sable et la « bétonisation » du front de mer. Le littoral de Tétouan, choisi comme site d’étude dans ce projet a le taux d’artificialisation du trait de côte le plus élevé en Méditerranée marocaine. En effet, plus de 95% des dunes littorales y ont été détruites pour les besoins du tourisme et des infrastructures. En conséquence, 70% des plages les plus prisées et les plus fréquentées par les estivants subissent une érosion accélérée. Les risques économiques potentiels pour l'industrie du tourisme liés au recul des plages sont énormes et il est urgent de sensibiliser les gestionnaires et les investisseurs au fait que les biens et services rendus par ce littoral -notamment le tourisme et la protection-, ne peuvent être durables que si les ressources naturelles sur lesquelles ils sont fondés, sont protégées de la dégradation. Parmi les outils les plus convainquant figure l’évaluation économique des bénéfices perdus ou des gains manqués, si les plages venaient à disparaître. En fonction de la disponibilité des données, deux services écosystémiques ont été évalués : le service d’approvisionnement (coût du sable) et le service culturel (nuitées touristiques). Les résultats ont permis d’estimer indirectement le coût de dégradation des plages à travers l’évaluation des pertes susceptibles d’être enregistrées par le secteur du tourisme, suite à la dégradation progressive de ces plages jusqu’à leur disparition totale, estimée à partir de la modélisation morphodynamique du littoral de Tétouan. Ainsi, dans un scénario où le cadre légal reste le même, où l’exploitation annuelle de sable continue au même rythme, et où le prix du sable n’augmente pas avec sa rareté, comparé aux gains susceptibles d’être enregistrés par le service ‘‘extraction de sable’’ au niveau du littoral de Tétouan d’ici 2050, avec le coût de la dégradation des plages basé sur les revenus du tourisme pour la même période, on peut conclure que les pertes du secteur touristique dépassent les gains du service d’approvisionnement. Ceci sans tenir compte des coûts additionnels imposés par les impacts attendus et inévitables du changement climatique. Les perspectives d’un déclin du tourisme, de pertes d’emplois liés au secteur, et d’une plus forte exposition du littoral aux inondations, interpellent les décideurs à la nécessité et à l’urgence de prendre en compte la valeur du capital naturel des plages lors de la planification et de la mise en œuvre de politiques et projets économiques, et de développement côtiers.