Abhatoo - Centre Nationale de Documentation

Cette contribution se propose de mettre l'accent sur la relation que Mehdi Ben Barka eut toute sa vie vis-à-vis du syndicalisme. Car Mehdi, dans ses textes les plus connus, parle peu du syndicalisme, mis à part certains passages de l'option révolutionnaire au Maroc. Certes, la scission du Parti de l'Istiqlal en janvier 1959, puis la fondation de l'UNFP la même année, peuvent être considérées comme ayant été l'œuvre conjointe de Mehdi et de Mahjoub Ben Seddik. Mais, s'il s'agissait plus d'une convergence que d'un projet commun, était-elle pour autant condamnée d'avance à l'éclatement qui advint plus tard entre l'UNFP, qui donna l’actuelle USFP (Union socialiste des forces populaires), et l'UMT ? En 1959, pour l'essentiel, à travers ces deux dirigeants, face au Palais, à la féodalité et à la grande bourgeoisie marocaine, compradore, ou compradore en gestation, il s'agissait de constituer une force commune des classes populaires urbaines, et avec elles, ou même à travers elles, pensait Mehdi, des classes populaires rurales. Si la nécessité de constituer début 1959 une telle force commune s'explique, et, par là, la non moins nécessaire différenciation avec le Parti de l'Istiqlal, représentant une bourgeoisie moyenne (nationale) trop marquée à l'époque par l'hégémonie de la grande bourgeoisie, impliquait-elle pour autant la rupture d'alors ? L'histoire politique de ces années doit y répondre, mais l'on peut se réjouir de la reconstitution aujourd'hui des liens alors rompus. Mais entre-temps, c'est au sein des classes populaires urbaines que les divisions sont apparues. Ces divisions étaient-elles inévitables et ne pourrait-on au contraire retrouver dans les démarches de l’époque ce qui permettrait de reconstruire les convergences d'alors, plus que jamais indispensables ? Pour cela, il faut analyser la différence d'approche entre Mehdi et Mahjoub sur la question clé des classes populaires urbaines dans les années 50.